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Archive for août 2010

Un matin, nous croisons une vieille vachère qui va mener ses bêtes à paître. Nous avons élu son village, près de Kastamonu, pour un temps de repos. Jadis arménien, il fut racheté par les voisins turcs qui eurent à essuyer quelques incendies au début des années 1970. Les Arméniens avaient deja émigres vers des lieux plus cosmopolites, en ville ou a l’etranger. Deux familles habitent désormais ces vieilles maisons en torchis et bois rénovées. Apres un jour d’accueil généreux en sourires et en ravitaillement victuailles, nous demandons a l’oncle, professeur d’anglais de notre age, quelles impressions notre voyage incongru laisse dans les esprits sedentaires autochtones. ‘For them, it’s a bit ridiculous ‘, car ils ne connaissent du monde exterieur que Kastamonou. Notre voyage est le fruit d’avancées et de problèmes sociaux qui concernent la France et dont ils n’ont bien entendu jamais entendu parler. Eux, vivent au rythme de leurs vaches, travaillent pour vivre, l’idée d’apprendre a se connaître soi-meme et a prendre du recul sur l’environnement dans lequel ils ont grandi leur est absolument etrangere…

 Pour nous aussi le décalage de comprehension est parfois violent. Lorsque les gens nous parlent, ils nous font sentir dans une impossibilité de concevoir notre voyage qu’il est aberrant pour Yannick d’embarquer sa femme dans un si long periple. İls ne mesurent pas pour la plupart d’entre eux, la duree et les epreuves que nous avons affrontes. Certains d’entre eux ne me considerent pas comme une personne a part entiere, ils ne peuvent pas s’imaginer ce que j’ai entrepris.

Dans une petite bourgade des montagnes, nous nous etions installes un peu a part devant une ecole desaffectee. Nous campions alors pour un temps indetermine en vue de se remettre de nos infections respectives. En peu de temps, nous avions sympathises avec l’imam, qui nous apportait regulierement sa bonne humeur et les fruits de son jardin. On parlait de sa voix, qui sonnait bien au moment de l’appel a la priere, du ramaddan qui bat son plein et du cafe bu le matin dans le jardin de la mosquee. Pour le remercier de ses bons soins, Yannick concocte un far breton hors pair chez les voisins. Le soir meme, l’imam se fait insistant pour connaitre davantage de details sur notre depart. Le ventre liquide ne nous permet pas de donner ces precisions, nous ne pouvons pas partir tant que nous sommes en miettes. ‘ Parce que si vous restez trop de temps, la police pourrait venir’. Ce village comporte tout au plus 5 familles, avec qui nous entretenons d’excellentes relations. ‘Qui va appeler la police ? Vous ?’ ne puis-je m’empecher de demander a l’imam, en colere. Cet homme apres tout bien courageux – qui a du etre manıpule par sa femme qui ne connaissait pas notre histoire-, s’est excuse d’avoir mis la police en jeu, nous a couvert de cadeaux toutes les 4 heures et pries de rester davantage. Nous etions fort surpris que quelqu’un de si amical suggere de nous virer de son bled comme des malpropres. Mais nous avons mesure le decalage de nos histoires, qui avaient succombe sous la fatigue de la repetition des rencontres, ou toujours il faut s’expliquer.

A present, nos hotes du jour sont fort comprehensifs et interesses, plus que la normale. Nous profitons de leurs petits enfants d’adorables gredins. Mais il n’est pas possible d’etre seuls, dix personnes nous observent pour apprendre a nous connaitre et cela dure des heures. Pour apprendre la patience, nous vous proposons un stage quand vous voulez !

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De Kurucaşıle ou notre famille nous a rejoint…

Manque de pot, ces quelques jours de ravitaillement affectifs ont ete brouilles par de traitrises infections urinaires et autres dont vos cyclistes furent les victimes. İl faut dire que lorsqu’on « pause », le corps, l’esprit et les anticorps se détendent par contraste avec le « poussage a tout » quotidien. İl ne s’agit pas seulement d’un repos vélo mais aussi d’une relâche de tous ces investissements, l’apprentissage de la langue étrangère et l’apprivoisement -reciproque- avec l’hôte et les autochtones en general qui demandent  beaucoup de patience et de concentration. Lors d’un arrêt prolonge, le corps revele ses faiblesses. Les articulations se rouillent, la musculature ou la non musculature par endroit (comme au vaste interne, a l’intérieur du genou et au bas du dos) est douloureuse et les dents crient « gare au sucre ». On croit s’en remettre après quelques siestes salvatrices, mais le mal est malheureusement proportionnel aux efforts, inscrits dans la durée. Avec un corps de grabataire qui nous confine a la literie, le moral  touche au fond, on traverse une phase de déprime obligee. İmmanquablement a chaque semaine de sédentarisation, l’un d’entre nous subit ces symptômes. Si bien que le repos est aussi fatigant a encaisser que le reste du voyage.

Cette fois-ci, nous sommes desole d’accueillir notre famille dans un état raplapla lamentable. L’un après, l’autre, nous sommes contraints de rester alités par extrême fatigue, diarrhée, maux de têtes et encombrements divers. Bienchanceux d’avoir une famille compréhensive et soutenante dans ces moments de déliquescence difficiles. İls sont aux petits soins, on en profite, mais on regrette tout de même de leur imposer des vacances 3e age. Encore une semaine de repos sera nécessaire avant que vos aventuriers ne repartent à l’assaut des Hittites.

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En cette haute saison de migrations vacancieres, certains en nous voyant s’écrient : Oh des touristes ! Et lorsque nous leurs demandons d’où ils viennent, ils disent d’ici avant de nous parler de leur ville à 3000 km à l’est du pays ou  d’Allemagne. Un Turc expatrié, nous raconte qu’ici les piscines des hôtels de luxe sont moins cheres qu’en Belgique, que les enfants en profitent bien. Alors touriste, qui est ? Dans les petits villages c’est avec fierté qu’on décrète faire le  cicerone (expression italienne, le guide) pour l’hôte, le touriste, l’étranger. Mais finalement, nous ouvrant leur porte, un Tchai, et vous avez faim ? attendez, je vous apporte quelque chose a manger… nous sommes vite reidentifies comme étant voyageurs, yolculer en turc, celui pour qui Allah dit qu’avec le pauvre, il faut offrir le gîte et le couvert. Souvent, on nous invite a manger a meme le sol, assis en tailleur les pieds sous la nappe, les petites assiettes de tomates, concombres, olives, fromage, yaourt, omelettes… sous la fourchette de chacun. Et avec insistance, ils nous pressent « ye,ye » ou « itch, itch », « mange, mange »,  » bois, bois » avec satisfaction de nous voir de l’appetit.

A la maison, les mamans et les filles aînées s’affairent à nous régaler dans la cuisine, sans sembler subir leurs conditions comme en Bosnie. İl faut dire que le père ou le fils donne un petit coup de main symbolique de préparation de la nappe ou de service du thé… İl y a tout de même celles, qui par tradition doivent servir la belle famille et gare a la belle mère qui peut être abusive. A 30 ans, il est courant d’avoir trois enfants. Et les notres ou sont-ils ? Plus tard, plus tard, en France on traine jusqu’a 30 ans pour un premier bebe. La proximite intergenerationnelle est agreable, d’autant plus qu’on montre son affection a l’autre par des gestes de sympathie. Les femmes débordent d’affection pour la voyageuse que je suis, parfois un petit cadeau, un foulard par exemple arrive entre mes mains. Pour Yannick, le pere offre genereusement un slip…

Le foulard, parlons-en. Les femmes les plus voilées, tout en noir ou habillees chaudement d’un imper choisissent souvent elles-memes ses atours par tradition ou par croyance, c’est après tout moins complique de choisir sa tenue le matin. Dans les villes, de jeunes résistantes ont les cheveux aux vents et les épaules dénudées. Mais a la campagne, en débardeur, les filles rigolardes m’attirent dans une pièce pour me vêtir  » les voisins te regardent » bouffent-elles, genees, alors qu’elles portent des T-shirts moulant leurs fraîches poitrines.

De Denizli, nous avons entrepris de remonter la Turquie en 4e vitesse pour retrouver les mamans et les frères sur la mer noire près de Safranbolu (rendez-vous le 4 aout). Au passage, nous avons fait un tour du cote des nécropoles phrygiennes, impressionantes et nombreuses dans la vallée entre Afyonkarahisar  (la citadelle noire de l’opium) et Eskişehir. Le paysage ocre, mıneral et sculpte par les ıntemperies ressemble a la Capadoce. A un endroit appelé Midas sehn, un mur gigantesque couvert de bas-reliefs geometriques a ete façonne dans la falaise. Quatre escaliers devaient conduire vers des lieux de cultes disparus. Un archéologue français a fouille les lieux dans les années 30. Amis archéologues et historiens, peut-etre pourriez vous nous en dire davantage depuis les bibliothèques françaises.

Entre Amasra et Cide, la haute montagne se jette dans la mer. Nous avons élu notre camp dans un petit village, sur la plage. La tente subit les ravages du sable, la mer est bleue foncee et tres salee, le decor a un cote breton. Beaucoup de femmes se baignent toutes habillees.  Les expatrıes turcs allemands ou francais sont ici en vacances et flirtent avec leurs cousins eloıgnes turcs, qu’ils epouseront probablement plus tard (car on ramene souvent un conjoint du pays en Occident). Un lieu de villégiature s’est presente pour accueillir les nôtres dans la masure de mamie Ainour, ancienne couturiere de robes de mariees, qui en ce moment même prépare des confitures avec la voisine dans de grands chaudrons. On nous a dépose dans l’coin par camion refrıgere dont mon estomac retourne se souvient encore. Ces petits bleds vivent de la construction de bateaux de pêcheurs, a quelques lieux des cites balnéaires littéralement envahies par les Stambouliotes.

Ce repos est bien mérite. Le voyage est éprouvant par moment. Avec la chaleur et nos contraintes de rencontres, il est hors de question de se coucher avec la nuit. Le 10 aout commence le ramadan. Baklava et fêtes de nuit, nous n’avons pas finis de découvrir l’Orient.

Les photos, promis, c’est pour bientôt sur Picasa, mais pour l’instant, ça ne marche pas.

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